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Résidence fiscale suisse et plus-value mobilière : le Conseil d’Etat remet l’église au milieu du village
CE 25 juin 2021, n° 442790
On se souvient que la Cour Administrative d’Appel de Paris s’était livrée il y a un an à une interprétation que nous avions alors trouvée très inquiétante de la Convention fiscale franco-suisse (https://blog.bornhauser-avocats.fr/2020/06/residence-fiscale-suisse-et-plus-value-mobiliere-un-arret-inquietant-de-la-cour-administrative-dappel-de-paris/). Elle avait en effet estimé qu’un contribuable résident suisse mais imposé selon le système du forfait ne pouvait pas revendiquer le bénéfice de la convention s’il n’avait pas été imposé en Suisse sur la plus-value de cession de titres d’une société dont il détenait la majorité du capital, de sorte que cette plus-value était imposable en France.
Le Conseil d’Etat vient d’annuler cet arrêt et, réglant l’affaire au fond, a déchargé le contribuable de l’impôt sur la plus-value qui avait été mis à sa charge. Pour parvenir à cette solution, le Haut Tribunal se livre à une analyse particulièrement didactique des textes. Il commence par rappeler que sur le terrain de la convention, les contribuables suisses imposés selon leur dépense (autre nom du régime du forfait) ne peuvent se prévaloir du bénéfice du traité dès lors qu’ils en sont expressément exclus par les stipulations de son article 4 § 6 b).
Il précise ensuite que par un échange de lettres entre les deux administrations publié dans la documentation administrative, le fisc français a accepté de ne pas opposer cette exclusion aux contribuables suisses dont le forfait respecte certaines limites, à savoir être supérieur à 5 fois la valeur locative de leur habitation, d’une part, et ne pas être inférieur… « aux éléments du revenu du contribuable qui proviennent de Suisse et de France, pour les revenus de source française, lorsqu’ils sont privilégiés par la convention, notamment dividendes, intérêts, redevances de licences ».
Le cœur du débat portant sur cette notion de revenus privilégiés par la Convention, le Conseil d’Etat a reproché à la Cour de ne pas avoir recherché la définition desdits revenus dans la Circulaire de l’administration suisse et donc d’avoir faussement affirmé que cette notion ne faisait l’objet d’aucune définition. Après avoir cassé l’arrêt, le Conseil d’Etat s’est plongé dans le droit suisse auquel l’échange de lettres renvoyait expressément pour constater que ce dernier n’imposant pas les plus-values mobilières, ces dernières ne pouvaient en aucun cas constituer des « revenus privilégiés ».
Même si cet arrêt n’a plus qu’un intérêt rétrospectif puisque la doctrine administrative sur lequel il se fonde a été rapportée depuis le 1er janvier 2012, la solution aura néanmoins le mérite de rappeler à l’administration fiscale française – et particulièrement à la DNVSF – que le constructivisme fiscal doit non seulement respecter les textes, mais aussi la parole de la France.