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Amende forfaitaire pour non-déclaration d’un compte étranger : la QPC est transmise au Conseil Constitutionnel.

Très mollement soutenu par son Rapporteur Public, le Conseil d’Etat a finalement décidé de transmettre notre Question Prioritaire de Constitutionnalité aux neuf sages de la rue de Montpensier, qui devront se prononcer dans les 3 mois. Une nouvelle procédure contradictoire va donc s’engager avec notre contradicteur, le Secrétariat Général du Gouvernement.
Nous commencerons par critiquer les doutes exprimés par le Rapporteur Public du Conseil d’Etat dans ses conclusions dont nous vous avons rendu compte dans notre actualité précédente, en rappelant que le principe d’une amende forfaitaire n’est pas satisfaisant pour les contrevenants situés aux deux extrémités du spectre : ceux dont le solde du compte est très élevé, pour qui l’amende est une piqûre de moustique, comme ceux dont au contraire le compte présente un solde très faible, où l’amende aboutit à une véritable spoliation.
Nous rappellerons ensuite que pour ces derniers, aucun espoir n’est à attendre du juge de l’impôt puisque le Conseil d’Etat lui refuse le droit, contrairement à la Cour de cassation, de modérer le montant des pénalités fiscales (Avis CE 5 avril 1996, n° 176611, Sect., Houdmond et Avis CE 8 juillet 1998, n° 195664, Fatell, rendus à propos des pénalités pour insuffisance de déclaration ; à l’inverse : Cass. com. 29 avril 1997 n° 1068 PB, Ferreira, rendu à propos de l’amende pour défaut d’acquisition de la vignette automobile et Cass. com. 22 février 2000 n° 488 P, Ferrière, rendu à propos des majorations pour défaut de déclaration). Ainsi, soit les conditions de l’application de l’amende sont réunies et le juge la validera pour son montant total, soit elles ne le sont pas et le juge la dégrèvera. Entre les deux, le néant.
Nous rappellerons également que le Conseil Constitutionnel n’est pas le seul juge qui sera amené à se prononcer sur cette question : la Cour Européenne des Droits de l’Homme sera en cas d’échec compétente pour apprécier si le droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention se satisfait de cette solution. Et il serait tout de même dommage que le « Pays des Droits de l’Homme » soit condamné pour avoir violé un droit aussi fondamental.
Nous conclurons en proposant au Conseil l’alternative suivante :
– soit déclarer inconstitutionnelles les amendes forfaitaires lorsqu’elles s’appliquent à des personnes physiques agissant dans le cadre de leur patrimoine privé,
– soit au contraire en valider le principe, mais en l’assortissant alors d’une réserve d’interprétation confirmant que contrairement à la position du Conseil d’Etat, la plénitude de juridiction dont jouit le juge de l’impôt lui permet de modérer le montant des amendes dont est redevable le contribuable défaillant pour tenir compte de sa situation.
La première branche de l’alternative donnera toute satisfaction à nos clients mais fragilisera les recettes attendues du mouvement de régularisation actuellement en cours auprès du STDR. La seconde renverra le débat devant les juges du fond mais ouvrira une boîte de Pandore que le Conseil d’Etat a maintenu bien fermée depuis le milieu des années 90.
Et pour nous qui réclamions déjà cette possibilité lorsque nous avions publié au Bulletin Fiscal Francis Lefebvre 10/93 notre tout premier article intitulé La Modération des Pénalités Fiscales Devant le Juge de l’Impôt : Une Révolution à Accomplir, ce serait l’aboutissement d’un combat de 22 ans.