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Contributions sociales sur les revenus du patrimoine des non-résidents : le feuilleton n’est pas fini !
L’Histoire est désormais bien connue : en août 2012, le législateur français assujettit les revenus du patrimoine des contribuables non-résidents aux contributions sociales (CSG et CRDS notamment).
Or, un arrêt rendu par la Cour de justice des Communautés Européenne (CJCE) le 3 avril 2008 (Aff. 103/06 Derouin c/ URSSAF) laissait pourtant supposer que cette mesure se heurtait à la règlementation européenne sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (Règlement 883/2004 du Conseil du 29 avril 2004).
Et effectivement, le 26 février 2015 (Aff. 623/13 de Ruyter), la Cour de justice de l’Union européenne (ex-CJCE), saisie d’une question préjudicielle par le Conseil d’Etat, confirme que les contributions sociales ainsi prélevées auprès de personnes qui ne relèvent pas de la sécurité sociale en France, caractérisent une situation de « double cotisation » parfaitement contraire aux règles posées par le droit de l’Union.
Prenant acte de cette décision, le Conseil d’Etat rendra le 27 juillet 2015 un arrêt (n° 365511) dont le Ministère des finances et des comptes publics tirera officiellement les conclusions le 20 octobre dernier par le biais d’un communiqué de presse (n° 486) précisant les conditions dans lesquelles elle restituera ces prélèvements par voie de réclamation.
Maigre consolation pour l’Etat : le prélèvement dit « de solidarité » (2 points des 15,50 % prélevées) qui, de par son affectation au Fond National des Solidarités Actives (FNSA), n’entre pas dans le champ d’application de la règlementation européenne avec laquelle la France s’est révélée en délicatesse, reste acquis au budget français. En effet, le Règlement européen sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, s’il englobe certaines prestations sociales dites « à caractère non contributif », les énumère limitativement (Annexe X). Les prestations versées par le FNSA n’y figurant pas, la contribution qui sert à les financer ne participe dont pas d’une « double cotisation » et l’Administration fiscale n’est donc pas tenue de la restituer.
La situation de ce prélèvement de solidarité au regard de son affectation budgétaire aura au moins eu le mérite de donner des idées au gouvernement : afin de sécuriser pour l’avenir ces prélèvements sociaux, il a profité de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (Loi 2015-1702 du 21 décembre 2015, article 24) pour faire voter le changement d’affectation des recettes provenant des contributions sociales prélevées sur les revenus du patrimoine des non-résidents. Désormais, ces recettes ne seront plus affectées aux branches générales de la sécurité sociale mais au Fonds de Solidarité Vieillesse (FSV), à la Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (CADES) et/ou à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
Or, il n’est pas sûr que la manœuvre fonctionnera. En effet, si l’on s’intéresse de près aux organismes bénéficiaires choisis, plusieurs constatations troublantes peuvent être faites.
D’une part, les lecteurs de l’annexe au Règlement précitée, s’ils n’ont pas eu le loisir d’y voir apparaître les contributions versées par le FNSA, ne manqueront pas de se rappeler que certaines allocations versées par le Fond de Solidarité Vieillesse y sont en revanche visées. Si les prestations versées par le FSV entrent ainsi dans le champ d’application de la règlementation européenne, force est d’en conclure que les contributions qui financent ces prestations caractérisent, à nouveau, une double cotisation que la CJUE devrait à nouveau condamner.
D’autre part, il sera intéressant de connaître la position des juges européens sur la question de savoir si le rôle de la CADES est réellement dépourvu de lien direct et suffisamment pertinent avec les lois de sécurité sociale visées par le droit de l’Union européenne.
Ainsi, une réelle incertitude entoure la conformité au droit de l’Union Européenne dont se prévaut à notre avis abusivement le gouvernement concernant les contributions sociales prélevées – depuis le 1er janvier 2015 concernant les revenus fonciers et depuis le 1er janvier 2016 concernant les plus-values immobilières – sur les revenus du patrimoine immobiliers en France des contribuables non-résidents.
Le plus drôle dans cette affaire, c’est que le prélèvement de solidarité ayant également changé d’affectation, il devrait donc – et c’est une nouveauté par rapport à la situation précédente – être lui aussi remboursé aux contribuables non-résidents. Un bel exemple d’hétérotélie…
Pour toutes ces raisons, nous invitons les contribuables résidents d’un autre Etat de l’Union Européenne, de l’Espace Économique Européen et de la Suisse, mais également tous ceux qui résident – et ils sont nombreux – dans un État lié à la France par un accord de sécurité sociale prévoyant l’unicité des affiliations, et qui ont loué et/ou vendu un bien immobilier situé en France, non seulement à réclamer – s’ils ne l’ont pas déjà fait – le remboursement des contributions sociales éventuellement acquittées en 2013 et/ou 2014 (à l’exclusion du prélèvement de solidarité), mais également à contester leur assujettissement à l’ensemble des contributions sociales qu’ils auront à payer à compter de cette année.
Notre cabinet d’avocats fiscalistes se tient à leur disposition pour les y assister, sachant que le combat s’annonce à nouveau sanglant… pour nos finances publiques !