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La responsabilité fiscale du dirigeant d’entreprise : une lueur d’espoir ?

dans un « délai satisfaisant ». Le service se croyait à l’abri du risque de nullité car la jurisprudence habituelle apprécie ce délai non pas à compter de la date du jugement de liquidation judiciaire mais à compter du jugement de clôture de la liquidation ou de la délivrance du certificat d’irrécouvrabilité. Le comptable public étant libre de demander ce certificat quand il veut, il lui suffit de délivrer l’assignation aussitôt après pour passer l’obstacle du « délai satisfaisant ». 

La Cour de Riom l’a bien compris et s’est attachée au contraire à l’analyse de la situation économique de l’entreprise à la date de sa mise en liquidation judiciaire. Elle a relevé que, dans les circonstances particulières de l’espèce, l’administration pouvait alors se convaincre de l’impossibilité de recouvrer sa créance auprès de la liquidation de l’entreprise. Elle en a conclu que le délai d’exercice de la poursuite n’était pas  « satisfaisant ».

Cette solution est conforme à la jurisprudence de la Cour de Cassation (Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 décembre 2019, n°18-22.139). Mais les conseillers auvergnats ont été ensuite beaucoup plus audacieux. Peut-être assurée de la solidité du premier moyen retenu qui la met à l’abri d’une cassation, la Cour s’est livrée à une attaque en règle contre une application aveugle de l’article L 267 du LPF.

Dans le cas qui leur était soumis, la dirigeante avait déclaré sa TVA mais ne l’avait pas payé, et ce à six reprises, ce qui est beaucoup. La Cour de Cassation considère en pareil cas, de façon constante depuis 60 ans, qu’un tel manquement constitue une inobservation grave et répétée au sens de l’article L 267 du LPF. La Cour de Riom est d’avis contraire. Elle relève que la TVA a été déclarée, que le défaut de paiement « ne résulte que des difficultés financières de l’entreprise », que le liquidateur n’a engagé aucune action en responsabilité, que l’administration n’apporte aucun élément fondant son accusation. Selon elle, la responsabilité du dirigeant ne peut être « systématique ». C’est bien en effet tout le problème.

La seconde décision a été rendue le 16 novembre 2020 par la 10e Chambre de la Cour d’appel de Paris. Cette fois le comptable public triomphe mais une phrase de l’arrêt, inhabituelle et finement ciselée, doit éveiller l’attention.

Le dirigeant contestait la régularité de la décision du directeur des impôts autorisant les poursuites donnée au comptable public « au regard de mentions erronées et non en connaissance de cause ». Le moyen était vain, car là encore des trains entiers de jurisprudence indiquent que le juge doit se borner à constater l’existence de cette autorisation.

Or, la Cour de Paris prend la peine d’indiquer que « Il n’appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la pertinence ou le caractère éclairé de l’autorisation ainsi consentie ». 

Les magistrats adressent parfois à la défense des messages subliminaux. Celui-ci est bien proche de notre angle d’attaque, que nous partageons avec ceux de nos confrères qui nous demandent d’intervenir dans ce contentieux à leurs côtés. L’espoir grandit dans nos rangs.