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Réduction de Capital et Abus de Droit : Enfin un peu de Bon Sens !
(TA Montreuil 17 octobre 2024, n° 2215137)
On se souvient qu’il y a quelques semaines, nous commentions un jugement du tribunal administratif de Bordeaux ayant reconnu l’abus de droit pour une réduction de capital non motivée par des pertes (Réduction de Capital et Abus de Droit : Mais Où Vont les Juges du Fond ? – Blog du Cabinet Bornhauser avocats). Nous indiquions que cette affaire impliquait deux associés et que le second attendait le jugement du tribunal administratif de Montreuil, avec des conclusions favorables à la décharge du rapporteur public.
L’essai est transformé avec enfin un jugement accordant la décharge sur exactement le même fondement que le Comité de l’Abus de Droit Fiscal lorsqu’il avait donné un avis défavorable à l’administration dans cette affaire : la circonstance que le capital a été ensuite augmenté pour retrouver son montant initial a été considérée comme non significative au regard du fait que la société venant de céder la branche principale de son activité, elle se retrouvait surcapitalisée au regard de son activité subsistante.
Nous pouvons collectivement pousser un « ouf » de soulagement tant les deux décisions précédentes avaient pu nous faire douter du bien-fondé de notre position. Il reste à espérer que les Cours Administratives d’Appel qui connaîtront de ces deux affaires sauront unir leurs violons dans le sens de l’absence d’abus, bien que nous n’ayons hélas aucun doute sur le fait qu’en cas d’échec, l’administration poussera les feux jusqu’au Conseil d’Etat. C’est donc notre juge suprême qui décidera si la définition orthodoxe de l’abus de droit avec son corollaire, la liberté de choisir la voie la moins imposée lorsque l’opération sous-jacente est intrinsèquement légitime, constitue toujours aujourd’hui notre droit positif. Compte tenu des enjeux, il serait dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice que l’une des cours saisies demande avant dire droit son avis au Conseil d’Etat. Nous comptons sur notre consœur Karine Binisti, qui est à la manœuvre dans ces deux dossiers, pour articuler cette demande.
Dans l’a ttente de sa position, il est préférable d’ajouter les bretelles à la ceinture et de faire précéder la réduction de capital d’une donation de titres aux enfants (par exemple) afin que leur sortie subséquente du capital de la société ne permette pas à l’administration de prétendre que l’opération aurait dissimulé une distribution de dividendes.