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Plafonnement de l’IFI 2019 : le recours pour excès de pouvoir est déposé

On se souvient que nous avions attiré l’attention de nos lecteurs sur la très mauvaise surprise qu’a constituée, pour les contribuables bénéficiant habituellement du plafonnement de leur Impôt sur la Fortune Immobilière, l’entrée en vigueur du Prélèvement A la Source (https://blog.bornhauser-avocats.fr/index.php/2019/09/03/plafonnement-de-limpot-sur-la-fortune-immobiliere-la-tres-mauvaise-surprise-de-lannee-2019/).

Nous les invitions à ne pas se laisser faire et à contester l’IFI non plafonné restant à leur charge en invoquant l’article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 relatif à l’égalité devant les charges publiques. Nous lancions un appel à candidature pour trouver, parmi les contribuables concernés, ceux désirant emprunter l’autoroute du Recours pour Excès de Pouvoir devant le Conseil d’Etat plutôt que le tortillard de la réclamation contentieuse puis la saisine des juges du fond.

Pour le compte de nos clients intéressés, nous avons donc déposé notre REP devant le Conseil d’Etat pour demander l’annulation de l’Instruction administrative prévoyant que l’impôt sur le revenu à prendre en compte pour le calcul du plafonnement était l’impôt après imputation du Crédit d’Impôt pour Modernisation du Recouvrement (CIMR). Toutefois, nous n’avons pas déposé de QPC invoquant l’article 13 de la DDHC. En effet, l’analyse de la jurisprudence récente du Conseil Constitutionnel révèle un net changement d’attitude en faveur de l’Etat, ce qui se traduit par une appréciation plus restrictive des garanties dont bénéficient les citoyens.Fort heureusement, le Conseil d’Etat fait une application des mêmes principes, lorsqu’ils sont fondés sur d’autres normes supérieures (Convention Européenne de Sauvegarde des Droits Fondamentaux – CEDH, Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne), qui est plus conforme à l’état du droit avant que le Conseil Constitutionnel ne serre la vis. C’est ainsi qu’il a annulé une amende sanctionnant un manquement déclaratif qui était fixée en pourcentage d’un chiffre d’affaires et non de l’impôt éludé sur le fondement de l’article Premier du Premier Protocole additionnel à la CEDH qui garantit le droit au respect des biens (CE 10 mars 2020 n° 437122). Dans cette affaire, le Requérant a soigneusement évité de déposer une QPC dont rien n’indique avec certitude qu’elle aurait été accueillie favorablement par le Conseil Constitutionnel.

En l’espèce, nous avons donc invoqué, entre autre argument, la violation du droit de nos clients au respect de leurs biens à laquelle aboutit la doctrine administrative litigieuse sur le fondement de l’article 1er du 1er Protocole additionnel à la CEDH. Nous espérons que le Conseil d’Etat sera sensible à l’argument, d’autant plus qu’en cas d’hésitation il dispose maintenant du droit de poser une Question Préjudicielle à la Cour Européenne des Droits de l’Homme en application du 16ème Protocole additionnel. Et en cas de rejet, nous pourrons alors saisir directement la Cour Européenne point pour faire condamner la France.

Nous espérons que ces évolutions, si elles sont favorables aux contribuables, incitent le Conseil Constitutionnel à réviser sa position et assouplir sa jurisprudence, faute de quoi il devra se contenter de regarder passer les trains…