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Plus-values en report et Droit Européen : les conclusions de l’avocat général sont publiées.

On se souvient (http://blog.bornhauser-avocats.fr/index.php/2016/07/03/actualites-et-ref...) qu’en mai et juillet 2016, le Conseil d’Etat avait saisi la CJUE de plusieurs questions préjudicielles pour savoir si l’article 8 de la Directive « Fusions » permettait ou non à l’Etat français de mettre en place un régime de report d’imposition au lieu et place d’un régime de sursis.
L’enjeu était de savoir si l’échange de titres pouvait déclencher une imposition qui, quoique bénéficiant d’un report d’imposition, n’en demeurait pas moins dans le champ territorial de l’Etat de résidence de contribuable ayant échangé ses titres. Avec comme conséquences qu’en cas de cession des titres reçus en échange après le départ de France du contribuable :
la plus-value en report pouvait à bon droit être imposée en France (affaire Jacob),
sans que la moins-value de cession puisse être imputée dessus (affaire Lassus).
Dans ses conclusions communes sous ces deux affaires référencées C-327/16 et C-421/16, l’avocat général Melchior Wathelet propose à la Cour les solutions suivantes.
Sur l’affaire Jacob, il considère que l’article 8 de la Directive « Fusions » n’interdit pas à la France, en recourant à la technique du report d’imposition, de conserver pour elle le droit d’imposer la plus-value en report lorsque cette dernière devient imposable, même si le contribuable, qui a quitté la France, voit le droit d’imposer cette plus-value attribué à son nouvel Etat de résidence. Il estime dès lors que c’est aux Etats concernés de régler entre eux par voie bilatérale le sort de cette plus-value dans le respect des libertés communautaires, ce qui signifie que dans son esprit c’est à l’Etat de résidence de renoncer à taxer cette plus-value en report pour éviter de faire subir au contribuable une double imposition.
En revanche, concernant l’affaire Lassus, il estime que le droit primaire (article 49 du TFUE sur la liberté d’établissement) oblige l’Etat autorisé à taxer la plus-value en report à imputer dessus les éventuelles moins-values subies par le contribuable lors de la vente des titres reçus en échange. Il justifie sa position par le fait que si le contribuable était resté résident français, il aurait eu droit à cette imputation, de sorte que la lui refuser constitue une discrimination à laquelle l’objectif de répartition harmonieux du droit d’imposer entre les Etats-membres ne saurait faire échec.
Si la CJUE suit, comme c’est probable, son avocat général, elle confirmera la validité juridique du report d’imposition pour les échanges de titres intervenus avant 2000 comme pour ceux intervenus à compter du 14 novembre 2012 entrant dans le champ d’application de l’article 150-0B ter du CGI.
En revanche, sa décision compliquera notre combat contre l’absence d’application des abattements pour durée de détention aux plus-values en report, puisque nous fondions précisément notre argumentation sur le fait que l’article 8 de la Directive « Fusions » obligeait la France à mettre en place un système de sursis d’imposition.
Il nous faudrait alors déplacer notre argumentaire sur le terrain des droits garantis par la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne et la Convention Européenne des Droits de l’Homme, avec des chances de succès bien plus aléatoires.